Cela fait six mois que la plus terrible épidémie d'Ebola a éclaté, et le monde est en train de perdre la bataille pour la contenir"
Joanne Liu, présidente de Médecins sans frontières à la tribune de l’ONU le 2 septembre 2014
Depuis janvier 2014, une épidémie d’Ebola touche l’Afrique de l’Ouest, principalement la Guinée, la Sierra Leone et le Liberia, provoquant des milliers de morts dans ces pays. Si la propagation du virus inquiète la communauté internationale par les quelques cas déclarés aux États-Unis et en Europe, le Nigéria et la RDC touchés pendant plusieurs mois ont cependant réussi à enrayer l’épidémie. Apparue pour la première fois au Soudan et au Zaïre (actuelle RDC) en 1976, cette fièvre hémorragique très grave est souvent mortelle chez l’homme.
1. C'est quoi Ebola ?
Le virus Ebola appartient à la famille des filovirus. Filo, simplement car il ressemble à un fil microscopique.
Le virus Ebola est l’un des plus meurtriers de la planète, dans le classement des agents biologiques pathogènes, il est de niveau 4.
Le virus Ebola comporte 5 souches :
Ebolavirus Zaïre
Ebolavirus Soudan
Ebolavirus Bundibugyo
Ebolavirus Reston
Forêt de Taï
Les trois premières sont associées aux épidémies humaines. La souche Zaïre est à l’origine de l’épidémie actuelle en Afrique de l’Ouest.
Les souches Reston et Forêt de Taï ne sont pas associées aux grandes épidémies humaines, aucun décès n’a été déclaré à ce jour. La souche Reston a été repérée aux Philippines et en République populaire de Chine, elle atteint principalement les singes et les porcs.
L'ORIGINE DE L'ÉPIDÉMIE 2014
Si l'origine du virus demeure inconnue, la chauve-souris frugivore est considérée comme l'hôte naturel. Les principaux vecteurs suspectés de transmettre la maladie sont les gorilles, les chimpanzés et les antilopes. La contamination de l’animal à l’homme se fait soit par manipulation de la viande de ces animaux infectés, soit par leur consommation, particulièrement en cas de cuisson insuffisante.
Il y a actuellement deux pistes pour l’origine de l’épidémie 2014 :
1- Selon une équipe de chercheurs anglais,
un enfant guinéen de deux ans pourrait être à l'origine de l'épidémie.
2- Dans une autre étude publiée dans la revue Science, la source de l’épidémie serait une guérisseuse vivant à Sokoma en Sierra Leone près de la frontière guinéenne.
2. Pourquoi Ebola se transmet aussi rapidement ?
C’est la première fois que le virus Ebola sévit dans des zones urbaines. La densité de population favorise sa transmission et pourrait être la raison majeure de la rapidité de la propagation de l’épidémie actuelle. Contrairement aux idées reçues, les mutations récentes du virus ne semblent pas en cause. En revanche, ces mutations ont modifié le caractère pathogène du virus. Le taux de mortalité était de 90 % en 1976, actuellement il est de 50 à 70 %.
Le virus Ebola envahit le sang et les cellules de la personne infectée. La progression de la maladie atteint généralement le fonctionnement des organes vitaux, en particulier les reins et le foie et provoque des hémorragies internes importantes.
La mort peut survenir, peu de temps après les premiers symptômes, par défaillance de nombreux organes et choc cardio-respiratoire.
ÉVOLUTION DE LA MALADIE :
La transmission d'homme à homme se produit par contact avec du sang, des sécrétions (éternuements), des liquides biologiques (salive, sang, urine, selles, vomissements, sperme, sueur), de personnes infectées ou par l’intermédiaire d’environnements contaminés.
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3. Comment éviter la contamination ?
- Aucun contact corporel (accolades, poignées de mains …)
- Se laver les mains aussi souvent que possible avec du savon et de l’eau
- Ne pas dormir avec le malade de la fièvre d’Ebola
- Ne pas rester sans protection près d’un malade d’Ebola
- Ne pas toucher les vêtements et autres objets souillés par les malades
- Éviter tout contact avec les vomissures, le sang, la selle d’un malade souffrant ou ayant succombé d’Ebola
- Toute personne présentant des symptômes doit immédiatement contacter le centre de santé le plus proche
- Les soignants doivent être protégés par un équipement de protection individuelle (EPI)
- Les vêtements et linges des malades doivent être manipulés et brûlés par des spécialistes munis d’un équipement de protection individuelle
- Ne pas toucher et/ou laver les cadavres, ce sont les personnels soignants qui doivent inhumer les morts
- Se faire injecter dans des conditions de protection édictées par les normes
- Éviter la pratique de toute scarification coutumière, tatouage pendant l’épidémie
- Les animaux trouvés morts en forêt ne doivent être ni touchés, ni mangés
- Après guérison : rapports sexuels avec préservatif pendant 3 mois, ou pas de rapport sexuel pendant 3 mois (le virus reste actif dans le sperme pendant cette période)
(Sources CDC, OMS, MSF)
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4. Comment un malade est-il pris en charge ?
Quand il est pris en charge dans un centre de santé, un malade présentant les symptômes de la maladie est placé en isolement. Une fois le diagnostic établi, il reçoit un traitement pour les infections secondaires. Les soignants recherchent toutes les personnes avec lesquelles le malade a été en contact tactile. Tous ceux qui l'ont touché sont alors mis en quarantaine d'observation pendant 21 jours, et leur température est vérifiée quotidiennement. Passé ce délai d’observation et en l’absence de fièvre, les personnes sont considérées comme non atteintes.
L'OMS rappelle que "les personnes traitées rapidement peuvent en guérir". Dans les centres de santé les patients peuvent recevoir des soins et des traitements de soutien tout au long de l’évolution de la maladie.
À QUOI RESSEMBLE UN CENTRE DE TRAITEMENT EBOLA ?
Survolez l'image pour activer les légendes :
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5. Pourquoi l’OMS a autorisé des traitements en phase de test ?
Aujourd’hui, il n’existe ni vaccin, ni médicaments certifiés pour lutter contre le virus Ebola.
Les malades reçoivent des soins intensifs de soutien traitant les symptômes et les infections secondaires. Très souvent déshydratés ils sont mis sous perfusion ou réhydratés par voie orale avec des solutions d'électrolytes.
Les laboratoires pharmaceutiques avaient jusqu’alors porté peu d’intérêt à la recherche sur le virus Ebola, parce que la maladie était cantonnée aux pays pauvres et qu’elle n’avait affecté qu’un nombre limité de personnes. Face à la progression foudroyante de l’épidémie 2014, la recherche internationale se mobilise et l’Organisation mondiale de la santé a donné son feu vert aux traitements expérimentaux.
Les experts en éthique de l'OMS ont autorisé des essais cliniques de traitements non homologués sous certaines conditions :
- transparence absolue sur le type de traitement,
- liberté de choix et garantie de confidentialité des malades
- implication des communautés locales avant toute utilisation d’une thérapie.
Début septembre, ils ont examiné 8 traitements, destinés à soigner les malades infectés par le virus Ebola et 2 vaccins, à visée préventive. Ces vaccins sont en cours de développement sans suivre le processus habituel d’homologation qui durerait une dizaine d’années.
Si ces traitements paraissent prometteurs dans le cadre des tests en laboratoire, rien ne certifie leur efficacité ni l'absence d'effets secondaires potentiellement dangereux.
Et ils ne sont, pour l’instant, pas disponibles à grande échelle.
6. L’épidémie 2014 est-elle la plus grave ?
Début septembre l’épidémie de 2014 avait déjà causé quatre fois plus de morts qu’en 1976. Les premières épidémies d’Ebola au Soudan et au Zaïre avaient provoqué environ 431 décès.
La dernière épidémie importante remonte à 2007. Elle avait touché l’Ouganda dans la région de Gulu et entrainé la mort de 224 personnes.
LES PRÉCÉDENTES ÉPIDÉMIES EBOLA :
L’épidémie actuelle se développe simultanément dans plusieurs foyers souvent éloignés les uns des autres, dans des pays différents et dans des zones urbaines. La souche du virus qui s'est propagée en RDC de fin août à mi-novembre, n’est pas la même que celle de Guinée. Ce nouveau foyer ne provenait donc pas d’un déplacement de l’épidémie de Guinée.
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7. Quelles stratégies pour lutter contre Ebola ?
L’Organisation mondiale de la santé a déclaré l'état d'urgence sanitaire mondiale et adopte une stratégie de lutte à l’échelle planétaire.
Pays touchés par au moins une transmission
- Les États doivent décréter l'état d'urgence et mobiliser tous les moyens possibles dans les systèmes de santé.
- Ils doivent aussi informer la population par le biais des chefs de villages ou des représentants religieux par exemple. Le but est de rappeler les principes de base de sécurité.
Pays avec un cas suspect ou confirmé ou limitrophes de pays touchés
- Ces pays doivent assurer une surveillance étroite des frontières, et contrôle de température pour tous les voyageurs transitant par les aéroports internationaux, les ports et les principaux postes frontières. En cas de fièvre, le risque Ebola doit être évalué, et tout déplacement de personne suspecte doit être interdit.
- Si le test pour le virus Ebola est confirmé positif, toutes les mesures de confinement doivent être prises pour éviter la transmission, en particulier la surveillance médicale des personnes ayant été en contact avec le sujet malade.
Devant l’urgence de la situation, toute la communauté internationale est également mobilisée pour lutter contre cette flambée d’Ebola et apporter une aide aux pays touchés (soins de santé, laboratoires mobiles, recherche). Le 18 septembre 2014, une résolution unanime a été adoptée par le
Conseil de sécurité de l’ONU.
Cette résolution appelle tous les États membres à fournir une aide d’urgence : hôpitaux de campagne, équipes médicales. Elle demande également de mettre fin à l’isolement du Liberia, de la Guinée et de la Sierra Leone. C’est la première fois que le Conseil qualifie une urgence sanitaire de
« menace pour la paix et la sécurité internationales ».
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