Depuis plusieurs décennies, l’urbanisation et le réchauffement climatique réduisent principalement les ressources en eau douce aux quatre coins de la planète. À l’horizon 2050, les populations vont-elles subir un stress hydrique ? Ce cri d'alarme, lancé depuis plus de dix ans, devient chaque jour une réalité. C’est pourquoi les Nations unies annoncent la « Décennie internationale d’action sur le thème de l’eau pour le développement durable (2018-2028) ». Face à la crainte de manquer de cet élément vital, l'humanité cherche des solutions. Explications dans notre infographie.

1. D'où vient l'eau ?

Les ressources en eau sur Terre

2. L'eau va-t-elle manquer dans les décennies à venir ?

Selon les estimations, la population devrait augmenter de 33% en 2050, entraînant une augmentation de 70% de la demande alimentaire.
La société de consommation a fortement modifié les habitudes alimentaires, privilégiant la viande, mais aussi celles de produits dont la fabrication demande beaucoup d’eau.

Source : OCDE
Dans le monde, l’agriculture est le secteur le plus consommateur d’eau, utilisée majoritairement pour l’irrigation (70%), l’industrie (19%) et les usages domestiques (11%).

Les disparités sont très fortes selon les régions, les pays d’Asie du Sud prélèvent plus de 91% de l’eau pour leur agriculture. Dans l'Union européenne, l'industrie consomme plus de la moitié de l'eau douce (51%) devant l'agriculture (30%) et l'usage domestique (18%), des données proches de l'Amérique du Nord (53% industrie, 34% agriculture, 13% usage domestique).

Répartition des usages de l'eau par secteur


Source : FAO

Les facteurs participants à l'augmentation des prélèvements en eau

Dans le monde, chaque jour des milliards de litres d'eau partent dans la nature à cause du manque d'étanchéité des réseaux.

Les fuites d'eau

Le gaspillage

Selon l’OMS, le minimum vital est de 20 litres d’eau par jour et par personne, alors qu’en moyenne un Indien consomme 25 litres d’eau par jour, un Français 143 litres, un Américain près de 300 litres et un Saoudien 500 litres.

Source : OMS, ONU

Le réchauffement climatique

Le réchauffement climatique et les violentes précipitations entraînent l'évaporation ou l'évacuation de l'eau avant que celle-ci ait le temps de remplir les nappes phréatiques. Selon l’OMS, le minimum vital est de 20 litres d’eau par jour et par personne (boissons et hygiène).
Plus de 80% des eaux usées résultant des activités humaines sont déversées dans les rivières ou la mer sans aucune dépollution.
Si la tendance actuelle à l'augmentation des prélèvements en eau se poursuit, entre la moitié et les deux tiers de l'humanité seront en situation de stress hydrique en 2025. De plus en plus de personnes risquent d'être touchées par le manque d’eau. Aujourd’hui, c’est le cas d’environ 50 % de la population, en 2050 ce sera 66 %.

3. Quels seront les pays les plus touchés ?

Le Giec prévoit des sécheresses plus importantes et plus fréquentes dans les zones déjà arides, réduisant les ressources en eau. En Afrique du Nord et au Moyen-Orient, les ressources en eau douce ont baissé de 2/3 ces quarante dernières années.

D'après les données de la FAO (2014), certains pays comme l'Afrique du Sud, Chypre ou le Maroc sont en situation de pénurie (moins de 1 000 mètres cubes par habitant par an). Parmi eux, l'Algérie, Israël et le Qatar sont en situation de pénurie extrême (moins de 500 mètres cubes).

2040 : Les pays touchés par le stress hydrique extrême


Source : World Ressource Institute
Les réserves souterraines sont menacées d’épuisement, 20% d’entre elles sont surexploitées actuellement. D’ici quelques dizaines d’années, certaines pourraient disparaître : une partie du bassin du Gange en Inde, dans le sud de l’Espagne et de l’Italie ou encore dans la vallée centrale de la Californie.

Au moins 1 personne sur 4 pourrait vivre dans un pays affecté par des pénuries d’eau chroniques ou fréquentes d’ici 2050.

4 - Pourquoi la crise sera-t-elle si grave dans les villes ?

Les populations vivant dans les zones urbaines seront presque multipliées par deux entre 2011 et 2050, passant de 3,6 milliards à 6,3 milliards. La demande en eau dans les villes devrait progresser de plus de 50 % au cours des 30 prochaines années selon les estimations de la Banque mondiale.

L’augmentation de la population, assortie à des épisodes de sécheresses fréquents et à des habitudes de consommation excessive, provoquera de graves problèmes d’approvisionnement en eau dans de nombreuses villes.

1,9 milliard de citadins seront confrontés à des pénuries d’eau saisonnières en 2050. Parmi les villes les plus touchées actuellement, la ville du Cap en Afrique du Sud connaît le premier épisode majeur de rationnement d’eau, en raison notamment d’une sécheresse sans précédent.

5. Les eaux usées, une solution ?

L'irrigation

L’essor démographique va accroître la quantité d’eaux usées domestiques industrielles et agricoles. Aujourd’hui, 80% des eaux usées sont déversées dans la nature sans être traitées ou réutilisées. Le traitement de ces eaux permettrait de faire face à la hausse constante de la demande. L’eau recyclée peut être réutilisée de très nombreuses fois. Aux États-Unis, on estime ainsi que l’eau des plus grands fleuves qui traversent le pays a été utilisée vingt fois avant d’atteindre la mer. Le recours à ce nouvel or noir est une solution déjà adoptée par de nombreux pays.
Le Ghana constitue un bon exemple d’agriculture urbaine et périurbaine qui se développe au moyen d’une irrigation informelle avec des eaux usées non traitées provenant de cours d’eau ou de drains. À Accra, les cultivateurs ont recours aux eaux usées non traitées pour irriguer plus de 15 espèces de légumes.

Alimentation du réseau d’eau potable

Les eaux usées, longtemps considérées comme rebuts, se révèlent aujourd’hui précieuses dans la gestion durable des villes. La capitale de la Namibie, Windhoek, en fait l’expérience depuis 1969. Pour faire face aux pénuries récurrentes, la ville a mis en place des infrastructures qui traitent jusqu’à 35% des eaux usées qui viennent ensuite alimenter les réserves d’eau potable. L’eau usée récupérée est indirectement utilisée comme eau potable depuis plus de vingt ans en Californie, Arizona et Virginie du Nord, où elle sert à remplir les aquifères (vastes réservoirs naturels) et à remettre à niveau les réservoirs. Au Qatar, 99 % de l'eau consommée provient du dessalement de l'eau de mer.
Depuis 1998, à Singapour, l’eau traitée est embouteillée et distribuée comme une eau de marque sous le nom NeWater. Même s'il pleut abondamment dans cette région, le pays, situé en bord de mer, ne peut pas compter sur une nappe phréatique suffisante.

La production d’énergie

L’hydroélectricité est la source d’énergie renouvelable la plus importante et la plus utilisée. Depuis 2011, elle représentait 16% de la production totale d’électricité dans le monde. Les substances organiques peuvent aussi dégager une forme d’énergie chimique sous forme de biogaz.
Depuis 1980, l’Afrique du Sud fait figure de pionnière en matière de traitement et de recyclage en interne des eaux usées dans le secteur industriel et dans le domaine de la production d’énergie thermique.

Le biomimétisme

S’inspirer de la nature et du vivant est un des secteurs en développement pour la gestion durable des ressources en eau. En France et en Californie, des solutions à partir de coquilles de crevettes et de crabes pour filtrer l’eau sont expérimentées.
Dans l’Indiana, aux États-Unis, la phytoépuration est utilisée pour le traitement de l’eau. Des marais artificiels ont été aménagés et ont surpassé les normes relatives à la qualité de l’eau pour l’usine de traitement des eaux usées de la ville.

En Afrique du Sud, le bidonville de Langrug filtre son eau grâce à un simple système de fûts filtrants et lavables. Les habitants déversent les eaux usées de leurs lessives et de leurs vaisselles dans de simples bassins de terre où sont cultivés des roseaux et des iris, des plantes ayant des capacités naturelles à filtrer les polluants chimiques.